La nouvelle Commission européenne a sans aucun doute du pain sur la planche. Outre les inquiétudes concernant la compétitivité économique européenne, l’UE est confrontée à une situation sécuritaire incertaine après le retour de Donald Trump.
Aneta Stefańczyk est analyste des politiques publiques, groupe de réflexion polonais Reform Institute.
Maintenir la transition propre sur la bonne voie reste essentiel pour l’avenir économique de l’Europe. Mais les recherches menées par l’Observatoire européen de la neutralité climatique (ECNO) ont révélé qu’il existe un sérieux manque de données sur les performances de l’Europe.
L’analyse a révélé que sur les 124 indicateurs choisis pour fournir une image complète des progrès, 36 présentaient des problèmes de disponibilité des données, ce qui a entravé l’évaluation de l’état des objectifs clés.
Ces indicateurs éclairent 13 « éléments de base » nécessaires à la construction d’une UE neutre pour le climat d’ici 2050, ainsi que leurs catalyseurs.
Malgré l’abondance de données liées au climat, il n’existe aucun mécanisme systématique permettant de transformer ces informations en informations exploitables pour l’élaboration des politiques. Même si la Commission européenne suit les émissions de gaz à effet de serre (GES), elle ne prend pas pleinement en compte les conditions favorables essentielles à une transition réussie.
Par exemple, la décarbonation de la base industrielle européenne nécessite des efforts coordonnés en matière de R&D, d’accès au financement, de marchés leaders et de développement des infrastructures. Pourtant, les données qui soutiennent ces processus sont dispersées et manquent de cohérence. Sans une approche rationalisée, l’UE risque de recourir à de multiples stratégies allant dans des directions différentes, retardant ainsi la transition à un moment où la rapidité est cruciale.
L’évaluation met également en évidence des lacunes importantes en matière de disponibilité, de qualité et de fréquence des données dans des domaines clés. En termes d’adaptation et de changements sociétaux, les informations sont insuffisantes sur l’efficacité avec laquelle l’Europe gère l’adaptation au climat ou encourage des changements de mode de vie alignés sur la neutralité climatique.
Tous ces éléments sont essentiels pour permettre et réaliser la transition vers une économie européenne compétitive et neutre pour le climat. Mais sans informations adéquates, ceux qui sont chargés de les réaliser risquent de voler à l’aveugle. L’Europe a besoin de données de haute qualité sur la transition.
En outre, seuls 13 des 27 plans nationaux en matière d’énergie et de climat (PNEC) mis à jour ont été soumis jusqu’à présent par les États membres, ce qui laisse un vide important dans la transparence de l’action nationale.
Le rapport Draghi a mis l’accent sur la nécessité de rendre la gouvernance européenne plus efficace et plus rationalisée. Un domaine évident où cela peut être réalisé, avec des bénéfices potentiellement énormes, réside dans des améliorations ciblées du système de planification et de reporting par les États membres, afin d’éclairer l’élaboration des politiques de l’UE.
Cela ne doit pas nécessairement alourdir la charge de reporting : dans de nombreux cas, il s’agit d’utiliser correctement les données déjà collectées, de suivre les progrès de manière systématique et de garantir qu’elles éclairent la législation dans le cadre du Clean Industrial Deal.
Comme l’a recommandé l’ECNO : « En intégrant les activités existantes de planification, de suivi et de reporting, un cadre révisé de suivi de la transition de l’UE pourrait conduire à une plus grande comparabilité, faciliter les évaluations et accroître la transparence. »
Créer une telle boussole pour l’élaboration des politiques de l’UE n’est pas une option, c’est un instrument essentiel pour garantir que l’UE soit en mesure de réaliser la transition en tant qu’élément central du renforcement de la compétitivité.
L’ajouter à la boîte à outils de gouvernance devrait être une priorité absolue pour la nouvelle Commission.